Ainsi, les articles premiers de la logique que nous proposons pourraient-ils être les suivants : 1. Aucun événement victimisant n’est d’avance attribué à un acteur coupable. 2. Seules les situations qui font problème pour quelqu’un (personnes individuelles ou collectives) (1) peuvent être l’occasion d’une intervention extérieure aux personnes impliquées dans cette situation, sur la demande de celles-ci. 3. Les solutions propres à résoudre ou à rendre viables les situations-problèmes ne sont pas déterminées à l’avance : le choix du modèle de réponse à envisager appartient aux intéressés. 4. Les conflits qui se produisent à l’intérieur d’un groupe sont résolus de préférence au sein de ce groupe (2) . Cependant, quand une personne impliquée dans une situation-problème souhaite y trouver remède à l’aide d’une intervention extérieure, elle peut recourir, soit à une médiation psychologiquement proche, soit à une justice officielle travaillant sur le mode civil (3) de règlement des conflits. 5. Lorsque dans une situation-problème, aucun recours concret n’est envisageable, un processus de soutien et d’apaisement doit exister qui aide la victime à faire face à cette situation. (1) Nous n’ignorons pas que le Ministère public est censé représenter l’intérêt des collectivités ou de la collectivité, mais nous contestons justement qu’un organe spécialisé qui n’a pas l’expérience personnelle de la problématique posée et qui reste sans contact avec la réalité vécue puisse remplir ce rôle de façon satisfaisante. Quand nous parlons de « collectivités » nous faisons allusion aux groupes directement impliqués dans une situation-problème. Par exemple, l’ensemble des personnes gênées par une pollution. Par exemple encore, les habitants d’un quartier ou d’une commune qui subissent des attaques répétées à des biens personnels ou collectifs. (2) On pourrait avec certains criminologues parler de « tribus », s’agissant par exemple du monde des entreprises, d’un club cycliste, d’un quartier présentant une vie communautaire, etc… Par contre, l’Etat, qui ne représente aucun groupe naturel, ne saurait être assimilé à une communauté de vie. (3) Ce terme n’est pas à prendre dans un sens juridique stricto sensu. Il sous-entend pour nous notamment certaines procédures administratives. » (Louk Hulsman, Punir mon beau souci, Revue de l’Université de Bruxelles, 1984, p. 310-311)
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